Une seule « race » ou l’arbitraire de toute classification
Une diversité inclassable et irréductible
Nous avons déjà vu que la couleur de la peau prêtait, comme tous les caractères de la « carrosserie » du corps humain, à des convergences, des ressemblances artificielles qui ne doivent rien à des communautés d’origine.
Il est donc évident que des classifications raciales qu’il est facile, techniquement, d’établir sur de tels caractères, n’ont aucun sens par rapport à l’origine ou à l’apparentement des populations.
Généalogie et parenté génétique
De multiples fois notre ancêtre…
Chacun de nos ancêtres réels peut être de multiples fois notre ancêtre si l’on remonte dans notre généalogie. Il suffit pour cela de quelques mariages entre cousins dans l’histoire de notre famille.
Le nombre d’ancêtres de chacun d’entre nous est alors bien plus faible que si l’on cherche à le calculer sans tenir compte de cette « consanguinité ».
Le faible nombre d’ancêtres lointains que nous partageons tous devient alors cohérent avec l’effectif total de la population mondiale estimé pour différentes périodes de l’histoire et de la Préhistoire.
Parenté génétique entre populations
Deux populations filles issues d’une même population mère conservent une parenté génétique élevée en échangeant des migrants et des conjoints.
Il en est de même pour toutes les populations voisines, à moins d’un isolement géographique et culturel spécialement important. De proche en proche, les populations mondiales sont plus ou moins fortement parentes selon les distances qui les séparent.
Des populations qui n’échangent ni conjoints, ni migrants peuvent néanmoins conserver une parenté étroite grâce aux échanges génétiques entre les populations intermédiaires.
Un gène parti d’une population A peut ainsi se retrouver en E en 15 à 17 générations.
Ce laps de temps est très faible à l’échelle de la Préhistoire, ce qui permet d’expliquer que presque tous les gènes sont présents partout, au moins à l’état de traces. La rapidité du passage est d’autant plus forte, bien sûr, que la fréquence du gène est plus élevée dans la population A.
Il n'existe qu'une seule espèce humaine mais pas de « races humaines »
Il se révèle impossible de classer les différentes populations humaines actuelles en races. Selon le niveau de précision que l’on cherche à respecter, on peut finalement énoncer soit qu’il n’y a pas de races dans notre espèce, soit qu’il n’y en a qu’une : l’Humanité, soit qu’il en a autant que d’humains, soit que le « concept de race n’est pas opérationnel pour notre espèce ».
La conséquence la plus claire est que tout raisonnement faisant référence à des races humaines est dépourvu de base scientifique.
Il se trouve qu’aucun des groupes formant aujourd’hui l’humanité n’a connu un isolement suffisamment long et rigoureux pour représenter une véritable race. »
L’Équation du nénuphar, ALBERT JACQUARD, EDITIONS Calmann-Lévy, 1998
Inclassables
Un kaléidoscope de différences, sans frontières
La diversité des individus de chaque population est énorme
Sur la plupart des grands continents, il n’existe pas de limites entre les populations. Les frontières, ou les limites linguistiques, sont souvent plus des zones de passage que des barrières biologiques.
Dans de telles conditions, chaque individu constituerait une « race » à lui seul, ce qui montre bien que classer les individus en groupes soi-disant homogènes est parfaitement arbitraire.
La classification combattue depuis longtemps
En France, Buffon déjà parlait de « races », mais en insistant sur le fait que c’était une simple « commodité » pour désigner « les grands groupes géographiques humains ».
En Allemagne, Herder écrivait en 1748 qu’il n’existait « ni quatre, ni cinq races humaines ». Il insistait sur la continuité de la variation des caractères physiques des humains d’une population à l’autre et affirmait que le concept de race, qui s’applique fort bien aux espèces domestiques sélectionnées par l’Homme, ne s’appliquait pas à notre propre espèce.
Classer pour dominer ou supprimer
Les seuls à avoir voulu, à tout prix, en faire une notion scientifique sont ceux dont l’objectif avoué était d’établir des hiérarchies, de justifier des inégalités ou des oppressions économiques, quand ce n’était pas, tout simplement, de supprimer les autres.
La science des classifications raciales était celle de la France coloniale et des empires coloniaux européens, de la ségrégation raciale aux États-Unis, de la génétique raciale du llle Reich, du Japon expansionniste, de l’apartheid.